Blog de Laurent Bloch
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ISSN 2271-3980
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Un film d’Eran Kolirin d’après un roman de Sayed Kashua
Et il y eut un matin
Les Palestiniens en Israël, un peuple sans destin
Article mis en ligne le 14 mai 2022
dernière modification le 15 mai 2022

par Laurent Bloch

L’assassinat à Jénine par l’armée israélienne de la journaliste palestinienne Shireen Abu Akleh m’incite à vous signaler que l’on peut encore voir sur quelques écrans (le Saint-André des Arts...) le film Et il y eut un matin que le cinéaste israélien Eran Kolirin a réalisé d’après le roman de l’écrivain palestinien Sayed Kashua, qui écrit en hébreu. Eran Kolirin avait déjà réalisé La Visite de la fanfare en 2007, qui racontait les tribulations d’une fanfare égyptienne venue en Israël pour un concours... de fanfares.

Sami est un Palestinien de nationalité israélienne, il vit à Jérusalem avec sa femme Mira et leur fils Adam, il a un poste de responsabilité dans une entreprise israélienne. À l’occasion du mariage de son frère cadet Aziz, Sami et sa famille reviennent chez ses parents, dans un village arabe d’Israël. Son père, fier de la réussite de son fils, y fait construire une maison, dans l’espoir qu’il vienne s’y installer, mais Sami dédaigne cette atmosphère villageoise, il espère retourner le plus vite possible à Jérusalem, où l’attendent ses activités de manager dynamique et surtout sa maîtresse israélienne.

Mais il ne va pas en être ainsi : dans la nuit, sans aucun avertissement ni explication, l’armée israélienne boucle le village, la téléphonie mobile et l’Internet sont coupés. Sami se démène, il va essayer de parlementer avec les militaires (ce sont les seuls passages du film où les personnages parlent hébreu, autrement tout est en arabe, lorsque j’ai vu le film, par moments, des spectateurs arabophones éclataient de rire, j’en déduis que les sous-titres laissent échapper quelques tournures drôles). Rien n’y fait, les routes sont barrées. Tout ce que Sami obtient, c’est de pénétrer dans le barrage où il obtient du réseau, ce qui lui permet de téléphoner à son patron israélien, qui lui apprend qu’il est licencié à cause de son absence.

À compter de ce moment, tout se déglingue. La population du village doit bien admettre que sa citoyenneté israélienne n’est pas de très bonne qualité, les petits malfrats palestiniens à qui les autorités israéliennes sous-traitent l’administration du village s’en donnent à cœur joie, un malheureux commerçant ruiné et quitté par sa femme s’aventure nuitamment près du barrage et se fait tuer par une sentinelle réveillée en sursaut.

Alors, finalement, cette population, qui vivait dans un entre-deux fait de compromissions plus ou moins honteuses, retrouve le sentiment de sa dignité. Sami, qui se vautrait dans des amours hédonistes et sans lendemain, revient vers Mira, leur couple reprend vie. Et, au matin, les villageois, sans s’être concertés, partent en cortège vers le barrage en portant le corps de l’homme tué par l’armée. Je ne dévoilerai pas le dernier plan, sidérant, qui dévoile quant à lui la vérité de toute la situation. Demain 17h 45 au Saint-André des Arts.